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PRAXIS 74 . Travail social et psychanalyse.

ACLIS 74

Pourquoi une association pour une clinique freudienne du lien social ?

 

S’il y a lieu de créer une association pour une clinique du lien social, c’est que le lien social suscite notre intérêt et que nous pensons qu’il est susceptible d’une approche clinique que nous souhaitons promouvoir par rapport à d’autres approches possibles. Comment le sujet peut-il se situer dans les discours qui organisent le lien social, quels sont les effets de ces discours sur la subjectivité ? La promotion d’une clinique du lien social suggère que ce lien génère une souffrance, un malaise, pour reprendre le mot de Freud, qu’il y a lieu d’entendre.

Il nous faut donc définir ce que nous entendons par « approche clinique » et «  lien social » en fonction du référentiel théorique que nous avons choisi, à savoir la psychanalyse freudienne et lacanienne.

Le mot « clinique » est importé du monde médical. Il signifie étymologiquement « au pied du lit du malade ». Il renvoie donc à une méthode basée sur l’observation de signes, qui renvoyant à d’autres signes, vont signifier quelque chose à quelqu’un. C’est la définition que Lacan donne du symptôme au sens médical du terme. Il oppose cette formule à celle du signifiant qui représente le sujet pour un autre signifiant. Que veut dire cela pour une approche clinique se référant à la psychanalyse ?

Cela signifie que la méthode clinique n’est pas une méthode empirique, basée sur l’interprétation plus ou moins intuitive de signes, en dehors d’une référence à une théorie précise. Elle s’appuie au contraire sur une théorie du sujet dans le Réel[1]. Pourquoi dans le Réel ? D’une part parce que le sujet est pris dans le jeu des signifiants, signifiants on ne peut plus réels, et répondant à une logique rigoureuse. D’autre part la clinique psychanalytique ne se contente pas de déchiffrer les phénomènes pour en délivrer le sens pour le sujet, elle prend également en compte ce qui ne peut être symbolisé, à savoir ce que Lacan a théorisé sous le terme de jouissance.

Le sujet qui nous intéresse est aussi bien le sujet singulier que le sujet collectif. Freud le montre dans son texte « Psychologie collective et analyse du Moi » qui donne les lignes de ce que l’on pourrait appeler une clinique du collectif, une clinique du groupe, une clinique du lien social.

Il a ainsi ouvert la voie à d’autres psychanalystes comme Bion qui dans son livre sur les petits groupes prolonge l’avancée de Freud. Lacan rend un hommage appuyé à Bion dans un article sur la psychiatrie anglaise pendant la guerre.

Une clinique psychanalytique du lien social est présente dans l’œuvre de Freud depuis « totem et tabou » jusqu’ à « l’avenir d’une illusion ». Freud est parti d’une clinique du sujet pris dans la névrose pour étendre cette clinique au collectif, ainsi qu’aux productions des sujets pris dans ce collectif, comme les œuvres d’art, la littérature…

Il existe donc, selon l’abord que l’on privilégie, une clinique du sujet, une clinique de l’institution, une clinique du sujet pris dans l’institution (institution est à prendre au sens large, de ce qui est institué et se matérialise dans différents dispositifs, différentes formes de liens sociaux, et est donc tributaire d’une idéologie, du pouvoir politique et économique).

Lacan poursuit cette théorisation qui permet une véritable clinique du lien social à travers sa théorie des 4 discours. Discours de l’hystérique, discours du maître, discours universitaire, discours analytique. Il y a rajouté le discours capitaliste.

Dans chacun de ces discours le sujet occupe une place différente, ainsi que le signifiant et la jouissance. Par rapport à quel discours dominant le sujet a-t-il aujourd’hui à se situer ?

Nous sommes dans ce questionnement-là. Nous voulons interroger les différents dispositifs institutionnels dans lesquels sont pris les sujets et le malaise qui en résulte et proposer une façon d’envisager les pratiques éclairée par une clinique psychanalytique du lien social pour redonner sens à ces pratiques aujourd’hui essentiellement subordonnées à des critères de performance et de rendement.

Pierre Hattermann

30/04/13



[1]  Jacques LACAN, séminaire III, page 211 : « le subjectif apparaît dans le réel en tant qu’il suppose que nous avons en face de nous un sujet capable de se servir du signifiant, du jeu du signifiant. »

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